L'éclairage public, nouveau, ne nous inflige plus la vue de câbles d'alimentation aériens; la vue est dégagée en cette fin juillet où la circulation automobile est réduite, où le stationnement même s'avère bien moins problématique que pendant l'année. Refaite et déjà empoussiérée, l'avenue change de nom à mi-parcours pour prendre le nom du 8 mai 1945, date marquée par une de ces terribles concomitances dont l'histoire a le secret, qui renvoie à la capitulation du IIIe Reich face aux Alliés comme à ce que l'on appelle les massacres de Sétif, Libération d'un côté et oppression coloniale de l'autre.
Curiosité en passant que cet arbre taillé, tronçonné, mutilé, où des champignons ont déjà trouvé refuge, mais qui résiste encore de toutes les forces que lui permettent ses timides surgeons et ses fragiles rejets. D'un côté à l'autre de l'avenue, les bâtiments peuvent se mirer dans les fenêtres de leur vis-à-vis.
On arrive à l'esplanade ouverte à la gare depuis les vastes travaux d'aménagement dont nous avons supporté longtemps le bruit. Un bâtiment nouveau porte ces teintes orange foncé à la mode, peu esthétiques et pourtant fréquentes: la standardisation des constructions réduit les frais d'études sans doute, mais ne devrait pas obliger à une monotonie de coloris. Heureusement, quelques touches de verdure où les fleurs résistent tant bien que mal à l'ardeur de l'astre du jour viennent offrir un peu de diversité. Continuons à monter: nous arrivons à la gare.
La gare de Garges-Sarcelles est construite sur l'équivalent d'un large pont qui surplombe la voie ferrée, à la limite des deux villes (Sarcelles, Garges-lès-Gonesse). C'est là qu'arrivera le nouveau tramway: la gare sera le terminus de la ligne T5 (l'autre étant Saint-Denis). Avant d'arriver dans la gare proprement dite, une plateforme (au même niveau de la gare) permet d'avoir une vue sur le boulevard Salvador-Allende.
Du même emplacement, en se décalant, ce sont les quais et les voies que l'on aperçoit (la vue va vers Paris). Les voies de droite sont celles qu'emprunte le RER D. La voie là plus à droite est celle du trafic montant du sud de Paris (via Gare-de-Lyon, Châtelet-les-Halles, Gare-du-Nord) vers Villers-le-Bel-Gonesse, Goussainville, Orry-la-Ville (terminus ordinaire) et, parfois, Creil. La voie centrale est utilisée par le trafic descendant du RER. Les voies les plus à gauche (dont une qu'on distingue mal, de l'autre côté du quai le plus à gauche) sont destinées aux grandes lignes, aux trains faisant des liaisons directes vers Creil, mais les TGV vers Lille, l'Eurostar et le Thalys y passent aussi et, avec eux parfois, des rêves de voyage.
Barrières, protections sont censées isoler les quais. De la passerelle qu'on voit descendait jadis des escaliers perpendiculaires qui conduisaient aux quais. Ils ont disparu tandis que des barrières étaient censées faire obstacle aux resquilleurs: en vain. Seules sont gênées les personnes à mobilité réduite ou les parents avec poussettes. Mais, nonobstant la distance qui sépare les chemins de fer des navires, tout banlieusard sait que les transports en commun, de diverses façons et pour des causes variées, s'apparentent toujours à un moment ou à un autre à... la galère.