vendredi 20 mars 2009

Manifestation

La manifestation du parisienne 19 mars 2009 a été d'une ampleur considérable. J'y ai pris quelques photos accessibles ici. Mais, hors les images qui restent de circonstance, un léger travail graphique, à partir de quelques unes des images-sources précitées, permet d'autres mises en valeur.

La manifestation est une convergence. Convergence d'idées, de revendications, de mots d'ordre. Convergence d'analyses, au moins en surface ou en apparence ; convergence en tout cas, pour ceux qui viennent d'horizons syndicaux divers et souvent concurrents, voire fort critiques les uns par rapport aux autres, sur la nécessité d'apporter à moment donné une réponse forte et donc commune (c'est pourquoi la convergence négative est celle qui caractérise les mobilisations les plus importantes).

C'est aussi une convergence topologique : d'abord vers un même point de départ, ensuite vers un même lieu d'arrivée. Du boulevard Beaumarchais (emprunté à République) vers Bastille, on voit bien les perspectives... même si l'on ne connaît pas (hors contexte) les perspectives attendues ou espérées par ceux qui battent le pavé parisien en espérant que le tintamarre contraigne les pouvoirs publics à dresser plus attentivement l'oreille.


Pourtant, bien que quelquefois les tambours rythment la marche, la manifestation n'a rien d'un défilé militaire. Elle est (le plus souvent) fort pacifique et c'est l'occasion, même entre militants qui se connaissent et ont pu passer des heures à discuter de choses fort sérieuses — qu'elles relèvent des relations avec l'employeur, des dossiers sociaux ou, simplement, du fonctionnement de la chose syndicale — d'échanger des propos plus détendus, moins formels, peut-être liés à l'action syndicale, peut-être aussi à des échanges plus personnels. Qui peut le dire au premier plan ?

Au centre de la photo, alors que l'on distingue le défilé, ses drapeaux et ses ballons gonflés à l'hélium, un militant brandit son drapeau, comme les autres, mais fixe en souriant l'objectif et le photographe (qu'il connaît) : dans une foule compacte, nombreux sont les échanges qui passent par un regard, un sourire, tout ce qui manifeste la solidarité des petits, de ceux qui ont le sentiment de n'être pas écoutés, voire d'être ignorés, par ceux qui décident.

D'une militante à l'autre, il y a eu un échange verbal dont ne subsiste qu'un sourire visible et un autre que seuls révèlent ce qu'on devine des plis de l'œil et de la lèvre — ou est-ce juste parce que l'œil même du photographe l'a déjà vu sans l'avoir saisi ailleurs que dans sa mémoire ?

Il n'en est pas moins vrai que ces mouvements collectifs, ces respirations sociales (sans doute parce que d'autres ne manquent pas d'air) sont l'occasion de complicités individuelles et collectives... complicités qui ne sont plus délictuelles depuis l'abrogation du délit de coalition en 1864.